Bibliomania : livres en cours

dimanche 27 février 2011

Au pays des programmes, les Concepteurs sont des dieux : bienvenue dans TRON L’Héritage



Titre original : Tron Legacy
Genre : SF, action, aventure
Réalisateur : Joseph Kosinski
Durée : 2h06
Année de production : 2010
Date de sortie : 9 février 2011

Synopsis :

Sam Flynn, 27 ans, est le fils expert en technologie de Kevin Flynn. Cherchant à percer le mystère de la disparition de son père, il se retrouve aspiré dans ce même monde de programmes redoutables et de jeux mortels où vit son père depuis 25 ans. Avec la fidèle confidente de Kevin, père et fils s'engagent dans un voyage où la mort guette, à travers un cyber univers époustouflant visuellement, devenu plus avancé technologiquement et plus dangereux que jamais...

(source : Allociné)

Le Premier Tron
Mon avis :

Mon qui d’habitude vais au cinéma 3 fois l’an, je n’arrête plus !
Bref, hier soir, je suis allée voir la version 2.0 de Tron, en VO et 3D (autant que ça en vaille la peine). Pour ceux qui ont oublié ou n’ont pas connu le premier Tron, petit récapitulatif.
En 1982, Steven Lisberger et Disney sortent un film de SF un peu spécial, qui se distingue par son esthétique très marquée, inspirée du jeu « pong » : si aujourd’hui les effets spéciaux sont kitsch au possible, à l’époque ils sont très novateurs, c’est une initiative audacieuse de la part du studio. L’histoire : Kevin Flynn (Jeff Bridges), un concepteur de jeux vidéos qui s'est vu voler ses jeux vidéos par son ex-employeur, veut à tout prix récupérer une preuve qui lui ferait valoir ses droits. Avec l'aide d'Alan (Bruce Boxleitner) et de Lora (Cindy Morgan), deux de ses anciens collègues, il infiltre le MCP (Maître Contrôleur Principal), un ordinateur avide de pouvoir à l'intelligence artificielle surdéveloppée. Quand ce dernier découvre que Flynn veut s'infiltrer dans ses circuits, il le téléporte dans un jeu vidéo. Pour s'évader, Flynn devra compter sur l'aide de Tron, un programme indépendant inventé par Alan. (encore merci Allociné !^^)


L’originalité de Tron réside, entre autres, dans l’idée d’humaniser les programmes : en effet, purs reflets de la personnalité de leurs concepteurs, ils en ont aussi le visage. Ainsi, Tron a l’apparence d’Alan, Yori celle de Lora (oui, chers lecteurs, les programmes sont sexués, et ils peuvent même tomber amoureux !). Dans leur univers (la grille), les Concepteurs invisibles sont l’équivalent de dieux. Mais surtout, c’est l’univers visuel de Tron qui rend ce film unique : les décors 3D numériques, l’omniprésence de lignes lumineuses bleues, jaunes ou rouges, les jeux vidéos grandeur nature (en particulier les mortelles courses de moto)… Quand j’étais toute petite, j’adorais Tron, à cause de son univers visuel complètement délirant. C’est donc avec une certaine curiosité que j’ai accueilli la nouvelle de la sortie prochaine d’une suite. Et quand, en voulant me renseigner un peu, j’ai vu ça :


J’ai commencé à être vraiment intriguée. Parce que Tron est précisément un film qui gagnerait à se faire un petit lifting avec ce que la technologie actuelle permet. Parce que Jeff Bridges est encore de la partie. Parce que le peu qu’on voit des images, et le peu qu’on entend de la musique, donnent déjà envie. Et parce que ce Jeff Bridges sadique présage d’un film plus sombre que le premier, sans doute…

Après visionnage, je peux dire que, d’un point de vue purement esthétique, le film est sublime. Pendant toute la première partie (dans le « monde réel », si je puis m’exprimer ainsi), l’image est restée en 2D, ce qui est un choix esthétique évident. Puis, lorsque Sam (Garrett Hedlund) est téléporté dans la grille, on bascule dans l’univers 3D.

Ce que j’ai aimé dans le film : les effets spéciaux très beaux, l’univers visuel dans son ensemble, la gestuelle chorégraphiée des personnages, les maquillages… Tout est peaufiné au millimètre, et franchement, ça le fait. Surtout que tout cela est magistralement soutenu par une bande originale absolument prodigieuse, signée Daft Punk, que je m’écoute en boucle depuis hier soir sur Deezer. Le visage de Clu (réalisé en images numériques) m’a bluffé par son réalisme.

Ce que j’ai moins apprécié : le scénario. Alors que la première moitié du film était très prometteuse, abordant même des thèmes actuels comme la gratuité des logiciels et le libre partage de données (sans pousser bien loin, car c’est avant tout un divertissement Disney, quand même…), le scénario finit par retomber dans un discours beaucoup plus convenu, et relativement ennuyeux (un peu plus de second degré n’aurait pas fait de mal…). Le personnage de Sam n’est pas aussi charismatique que l’était son père dans le premier Tron (ni d’ailleurs dans le deuxième !), quant à ce qu’est devenu Kevin Flynn, comparé au hacker coolissime de Tron 1.0, le personnage a évolué d’une manière assez surprenante, passant du PDG d’Encom pris dans son délire de « système parfait » au maître zen qui médite là haut sur sa montagne. Enfin, le rôle anecdotique accordé à Tron (qui est quand même le personnage éponyme !) dans l’action m’a beaucoup déçue, jusqu’au bout j’avais l’espoir que le personnage prenne un peu plus d’ampleur, mais… non. Et d’ailleurs, maintenant que j’y pense, qu’est devenue Yori ???

Reste un très beau spectacle, qui donne un bon coup de jeune à l’esthétique culte de Tron, et constitue un plaisir pour les yeux et les oreilles. Rien que pour ça, je ne regrette pas l’investissement.


Question : les Daft Punk sont cachés dans cette vidéo, saurez-vous les retrouver ?...



Bande annonce de Tron (1982) :



Bande annonce de Tron Legacy :

vendredi 25 février 2011

Neuromancien

Catégorie : Roman
Genre : SF, cyberpunk
Auteur : William Gibson
Année de publication : 1984
Edition : J’ai lu
Année d’édition : 2001

L’Histoire :

Dans la Conurb, la plus grande métropole du monde, Henry Dorsett Case est un hacker, un pirate informatique. Il est le meilleur et rien ne lui résiste. Mais un jour, étant trop gourmand, il décide de doubler son employeur. Celui-ci, en représailles, lui injecte une neurotoxine qui lui détruit de manière sélective une partie du système nerveux, celle qui est reliée aux trodes (les électrodes de sa console informatique). Case perd alors toute capacité à se connecter au réseau : pour lui, tout est perdu, il n'est plus rien...
Aussi, lorsqu'un jour Armitage, un homme mystérieux au passé trouble mais apparemment influent, et Molly, une mercenaire dangereuse dont les yeux ont été remplacés par des implants oculaires, lui proposent de lui redonner accès au Cyberespace, Case accepte sans hésiter. Mais sa mission est risquée : il s'agit de pénétrer le système informatique d'une gigantesque multinationale, l'entreprise Tessier Ashpool, avec l'aide du mystérieux Muetdhiver.
Mais Case va découvrir que Muetdhiver est en fait une intelligence artificielle, et que sa mission a des enjeux bien plus importants que le « simple » vol de données confidentielles...

(source : Wikipedia)

L’Auteur :

William Gibson est né aux États-Unis en 1948, mais vit au Canada depuis l'âge de 20 ans.
Fasciné par le japon et l'informatique, il est l'un des pères fondateurs du mouvement littéraire cyberpunk, qui décrit un futur sombre et technologique où fusionnent univers réel et réalités virtuelles.

Mon Avis :

Neuromancien est un classique de la SF : ancêtre de Matrix, œuvre fondatrice du mouvement cyberpunk, il a contribué à révolutionner le petit monde de la SF au début des années 80, et, à vrai dire, ses presque 30 ans d’âge ne se font pas du tout sentir à la lecture. Il a obtenu les Prix Nebula, Prix Philip K. Dick et Hugo du meilleur roman en 1984-85.
Même si, globalement, j’ai aimé cette lecture, j’en suis sortie un peu perplexe, car j’ai le sentiment d’être passée à côté de l’essentiel. En effet l’écriture de Gibson n’est pas facile à suivre : jargon technologique, actions qui s’enchaînent parfois sans fil conducteur apparent et sont décrites de manière peu claire… C’est un style déroutant, assez hermétique, et le lecteur a vraiment intérêt à s’accrocher pour ne pas (trop) se perdre. Malgré tout, la plume de Gibson est agréable, très visuelle, voire cinématographique, en mélangeant l’ambiance du film noir à l’univers de la SF, dans une société cosmopolite : on peut d’ailleurs faire beaucoup de parallèles avec Blade Runner (le film) tant ils présentent de caractéristiques communes, aussi bien sur le fond que sur la forme.
Dans Neuromancien, Gibson a une vision étonnamment claire de l’avenir d’internet et de l’évolution de la société ; il y invente le « cyberspace », un espace virtuel où les « câblés » circulent au milieu des données et les manipulent (les éléments du cyberspace sont perçus par le biais des sensations : vue, ouïe, toucher, ce qui donne au cyberspace une dimension presque organique). Dans cet univers, les enjeux économiques ont largement pris le pas sur la conscience politique : les multinationales ont pris la place des gouvernements, et les IA (Intelligence Artificielles) constituent l’arme ultime…
Neuromancien peut donner lieu à de multiples interprétations : il pose notamment des questions sur la nature de la conscience et de la mort, l’existence de Dieu ; les dernières lignes du roman, particulièrement énigmatiques, intriguent et poussent le lecteur à remettre en cause sa compréhension de l’oeuvre.

Conclusion :

Cette lecture n’était pas facile, et je me rends bien compte que je n’ai fait qu’en effleurer le sens. Malgré tout, j’ai l’intention de le relire un jour, et de lire les deux romans du même auteur qui lui succèdent : Comte Zéro et Mona Lisa s'éclate.
Apparemment une adaptation ciné est prévue pour 2011, mais Gibson n’a pris aucune part à l’écriture du scénario, qu’il renie totalement (c’est bien parti…), et une rumeur veut qu’Hayden Christensen y tienne le rôle principal (mais pourquoi lui ???). Vous l’aurez compris, je ne suis pas spécialement emballée. Mais puisque j’en suis à parler d’adaptations, j’ai appris récemment grâce à Lelf que Michel Gondry projetait d’adapter Ubik !!! En voilà une nouvelle qu’elle est bonne…

(un grand merci à SK.net pour m'avoir prêté ce magnifique émoticône à l'insu de leur plein gré^^)

Black Swan


Réalisateur : Darren Aronofsky
Arrangements et composition de la BO : Clint Mansell
Date de sortie : 9 février 2011
Durée : 1h43
Genre : drame, thriller, fantastique


Pitch :

Rivalités dans la troupe du New York City Ballet. Nina est prête à tout pour obtenir le rôle principal du Lac des cygnes que dirige l’ambigu Thomas. Mais elle se trouve bientôt confrontée à la belle et sensuelle nouvelle recrue, Lily...

(source : Allociné)


Mon avis :

N’ayant vu aucun autre film de Darren Aronofsky (hé non, je n’ai pas vu Requiem for a Dream ni The Fountain !), je n’avais pas d’attente particulière vis-à-vis de ce film, qui fut une bonne surprise.
En effet le film est très bien fait : la réalisation distille un climat oppressant autour de Nina, incarnation parfaite du cygne blanc qui doit apprendre à libérer le cygne noir qui dort en elle pour satisfaire les exigences de son maître de ballet (Vincent Cassel), avec l’angoisse qu’il lui retire le rôle pour favoriser Lily, dont la sensualité et l’aisance en font le parfait cygne noir.
Petit à petit, on voit Nina passer de l’obsession à la névrose : par petites touches, on glisse dans le cauchemar éveillé, on ne sait plus distinguer la réalité de l’hallucination, tout se mélange, et l’univers visuel du film passe  progressivement de l’hyperréalisme à un onirisme sombre et effrayant.
Darren Aronofsky
Je n’ai pas pu m’empêcher de penser à Polanski devant ce film, qui reprend un peu le même schéma que Répulsion, Rosemary’s Baby ou Le Locataire ; je ne sais pas s’il est très judicieux de classer Black Swan dans le genre fantastique, car ce n’est pas du tout comme ça que j’ai perçu le film (même si l’atmosphère y confine, avec notamment des scènes qui font penser à La Mouche de Cronenberg… et je n’en dirai pas plus là-dessus !^^). Au contraire, pour moi il s’agit plutôt d’un film sur la folie, où les exigences d’un maître de ballet intransigeant (que la même danseuse incarne les deux opposés parfaits que sont le cygne blanc et sa jumelle maléfique, le cygne noir), alliées à un univers personnel malsain (une mère possessive, ancienne danseuse, qui infantilise sa fille, encourage son obsession et cherche à retrouver en elle l’assouvissement de ses ambitions de jeunesse) contribuent à faire basculer Nina dans la paranoïa et la schizophrénie, avec en arrière plan les thématiques de l’art, de la métamorphose, de la quête de perfection et d’absolu.
Natalie Portman n’est pas, habituellement, une actrice qui m’impressionne beaucoup, mais je l’ai trouvée particulièrement convaincante dans ce film : aussi bien dans les scènes de danse que dans son jeu d’actrice, elle s’en sort très bien. Quant aux apparitions de Winona Ryder, elles sont (malheureusement) courtes mais très marquantes ! Enfin je voulais mentionner Mila Kunis dans le rôle de Lily, que je ne connaissais pas du tout et qui m’a fait forte impression^^.
Enfin, pour moi qui ne suis pas du tout familière du milieu de la danse (et encore moins la danse classique), ce fut aussi l’occasion de le découvrir un peu (en plus j’ai eu la chance de voir le film en compagnie de Melisende, qui connaît bien cet univers, et que je remercie de m’avoir traîné au ciné pour voir Black Swan !^^).

Bref, un bon film, intéressant, esthétiquement très beau, avec plusieurs scènes vraiment éblouissantes, mais qui suscite le malaise et que je déconseille à un public trop jeune ou trop sensible (car, sans être franchement gores, certaines scènes sont assez saisissantes).

samedi 19 février 2011

Le Discours d'un Roi


Réalisateur: Tom Hooper
Année de production: 2010
Date de sortie: 2 février 2011
Genre: Drame, biographie, film historique

Le pitch :

D’après l’histoire vraie et méconnue du père de l’actuelle Reine Elisabeth, qui va devenir, contraint et forcé, le Roi George VI (Colin Firth), suite à l’abdication de son frère Edouard VIII (Guy Pearce). D’apparence fragile, incapable de s’exprimer en public, considéré par certains comme inapte à la fonction, George VI tentera de surmonter son handicap grâce au soutien indéfectible de sa femme (Helena Bonham Carter) et d’affronter ses peurs avec l’aide d’un thérapeute du langage (Geoffrey Rush) aux méthodes peu conventionnelles. Il devra vaincre son bégaiement pour assumer pleinement son rôle, et faire de son empire le premier rempart contre l’Allemagne nazie.

(source : Allocine)

Tom Hooper
Mon Avis à chaud :

Je ne vais pas mentir, la première chose qui m’a attiré dans ce film, ce n’est pas l’histoire, mais le casting, avec en tête Colin Firth, Helena Bonham-Carter et Guy Pierce. J’ignorais tout du roi George VI, de la part qu’il a prise dans la seconde guerre mondiale, et de ses problèmes d’élocution avant d’entendre parler du film. Quant au réalisateur, Tom Hooper, j’étais complètement passée à côté de son travail jusqu’ici (bien que la mini-série Elizabeth I, qui a valu un Golden Globe à Helen Mirren la même année que sa performance dans The Queen, commence à me faire de l’œil).

Le Roi George VI, père d'Elizabeth II
Le film s’ouvre sur le discours de clôture du Prince Albert, Duc d’York (futur Roi George VI) pour la British Empire Exhibition à Wembley le 31 octobre 1925 ; d’emblée le spectateur est donc confronté au calvaire que représente son handicap pour le Prince, chaque fois qu’il doit s’exprimer en public, et de la terreur qu’il en éprouve. C’est avec beaucoup de justesse de ton et de pudeur que le film est réalisé et écrit, et les acteurs sont tous magistraux : Colin Firth et Geoffrey Rush sont les deux piliers du film, quant à Helena Bonham-Carter, elle est, comme toujours, lumineuse. J’ai été aussi très agréablement surprise de voir Jennifer Ehle dans le rôle de Myrtle Logue (plus de quinze ans après Orgueil et Préjugés, la voilà à nouveau réunie à l’écran avec Colin Firth !) et David Bamber (un autre rescapé de l’adaptation de la BBC, où il joue Mr Collins^^) qui donne la réplique à Geoffrey Rush.
Très bien écrit et réalisé (comment ça je me répète ?^^), le film happe l’attention du spectateur dès les premières secondes ; alors que j’avais un peu peur de m’ennuyer, au contraire le rythme des scènes est parfait et ne laisse de place à aucun temps mort. Sans jamais verser dans le pathos ni le ridicule, l’histoire qu’on nous raconte suscite l’émotion tout naturellement, portée par des acteurs à la fois très talentueux et très impliqués, tout en mettant en lumière un pan méconnu (et pourtant très intéressant) de l’Histoire du Royaume-Uni, en montrant la famille royale sous un angle inédit.

En bref, Le Discours d’un Roi est un film qu’il faut ABSOLUMENT aller voir !

vendredi 18 février 2011

Quand Berserk rencontre Ken le Survivant : Japan

Catégorie : Manga
Genre : seinen, SF, anticipation
Auteur : Buronson
Dessinateur : Kentaro Miura
Année de publication (au Japon) : 1992
Edition (France) : Glénat
Année d’édition : 2008


Résumé de quatrième de couverture :

Le Yakuza Katsuji Yashima se rend en Espagne pour retrouver la journaliste dont il est amoureux. Mais un violent séisme les projette dans des ruines et une étrange vieille femme les met en garde contre leur arrogance… avant de les envoyer dans le futur !
Malheureusement, ce futur n’est qu’un monde de désolation où le despotisme règne en maître. La lutte pour la survie vient de commencer…



Mon avis :

Kentaro Miura
Complètement obsédée par Berserk, je ne peux que m’intéresser aux (rares) autres projets de monsieur Miura. Oh-Roh (avec sa suite Oh-Roh Den) et Japan sont les 2 projets créés en collaboration avec Buronson, l’auteur du célèbre Hokuto no Ken (Ken le survivant). Japan date de 1992, soit 3 ans après le début des publications de Berserk : en gros Japan se situe entre les tomes 5 et 6 de Berserk (publiés autour de 1991 et 1993 au Japon). Si on connaît Berserk, on reconnaît d’ailleurs bien le coup de crayon de Miura à l’époque : le style de dessin est exactement le même que dans l’âge d’or de Berserk, même le charac design ne diffère pas beaucoup : physiquement Yashima est un mix entre Guts et Zodd, et Yuka (la journaliste dont il est amoureux) est située quelque part entre Casca et Charlotte. Il serait injuste d’y voir un manque d’imagination de la part du dessinateur (passke bon… il en a !!!), ce n’est d’ailleurs pas forcément un mal : je le vois plutôt comme un clin d’œil à ses lecteurs. A part ça, j’étais contente de voir les dessins de Miura dans un contexte autre que la fantasy : le début est bien ancré dans un décor réaliste, les personnages ont des looks très branchés 80’, puis patatras, un tremblement de terre surgit, une vieille sorcière débarque au milieu de momies carthaginoises, et le groupe des héros se retrouve projeté dans un univers post-apocalyptique à la Mad Max^^. Il y a beaucoup de passages que j’ai apprécié au niveau du dessin (notamment l’épave  au milieu du désert, et le look du chef des pirates, ou encore les ruines de la Sagrada Familia de Barcelone qui rappelle La Planète des Singes). Et en lisant je ne pouvais pas m’empêcher de penser que, si Miura décidait, aujourd’hui, de se lancer dans un projet complètement différent de Berserk, comme un manga SF, ou une biographie de Vlad Tepes, ce serait vraiment excitant !!!…. Mais bon, faut pas y penser, il faut qu’il finisse Berserk d’abord !



Buronson
Sinon, au niveau de l’histoire en elle-même, le manga n’est pas franchement exceptionnel. Je n’ai jamais lu ni regardé Ken le Survivant (et à vrai dire ça ne m’a jamais attiré plus que ça) et Japan ne m’a pas emballé outre mesure : dans l’ensemble le propos reste assez naïf et même un peu lourd par moments, et les personnages n’ont rien d’inoubliables. J’ai même été un poil agacée par le traitement des personnages féminin : pendant les quatre cinquièmes de l’action, les faibles femmes n’ont que deux options pour survivre : se prostituer ou se mettre sous la protection d’un mâle grand et fort équipé d’un gros gourdin bien costaud (et qui ne profite jamais de la situation… hem hem), et quand vient l’heure de la baston elles restent sagement à l’écart sans que l’idée de se battre pour leur survie ne les effleure… Alors certes, tout ça est ancré dans un contexte bien particulier, en plus c’est un one-shot, c’est court, on a pas le temps pour la nuance, mais quand-même, c’est un détail irritant.
Malgré tout, ça reste une lecture agréable, et pour moi c’est avant tout un rare échantillon de ce que Miura a fait en dehors de Berserk, rien que pour ça je suis donc ravie de l’avoir sous la main^^.

lundi 14 février 2011

La Fille qui aimait trop les films d’horreur : Yamato Nadeshiko Shichi Henge (Perfect Girl Evolution)


Auteur : Tomoko Hayakawa
Genre : Manga shojo, comédie, romance, fantastique, horreur
Années de publication : 2000 –
Editeur français : Pika

Tombée complètement par hasard sur un extrait de l’anime, j’ai été suffisamment intriguée pour me lancer : après avoir visionné les 25 épisodes, je me suis mise au manga. Et bien que le shojo ne soit pas du tout mon genre de prédilection, je suis complètement tombée sous le charme !

L’histoire :

Ranmaru, Yuki, Takenaga et Kyohei sont quatre « bishounen », des lycéens extrêmement séduisants et populaires qui vivent ensemble dans une immense maison qu’ils louent à une jolie veuve aussi richissime qu’excentrique (et un brin tyrannique). Un jour, cette dernière leur lance un défi : transformer sa nièce en « Yamato Nadeshiko » (incarnation de la femme japonaise idéale), en échange de quoi leur loyer deviendra gratuit. Les quatre garçons acceptent sans avoir conscience de l’ampleur du challenge…
Deux ans plus tôt, Sunako Nakahara (la demoiselle en question) subit une cuisante déception sentimentale lorsqu’elle fait sa déclaration au garçon qu’elle aime : celui-ci lui répond « Je déteste les filles laides », faisant voler en éclats l’ego de la jeune fille. Elle prend alors une décision : plus jamais elle ne se regardera dans un miroir, plus jamais elle ne se comparera aux autres filles, plus jamais elle ne cherchera à avoir quoi que ce soit à voir avec une quelconque forme de beauté ou de romance ; elle se réfugie dans la solitude et les ténèbres, s’abandonnant voluptueusement à son goût prononcé pour le morbide et l’horreur : elle collectionne des crânes, des armes dangereuses, des organes conservés dans des bocaux de formol et des DVD de films d’horreur et de Tim Burton. Ses meilleurs amis sont des mannequins demi-écorchés et un squelette humain grandeur nature baptisés respectivement Hiroshi, Akira et Joséphine. Sa chambre est un sanctuaire où la lumière du jour n’a pas sa place.
D’aspect effrayant, Sunako ressemble plus à une apparition fantomatique qu’à un être humain (dans certains dessins elle rappelle Sadako dans The Ring). Les quatre garçons chargés de sa métamorphose, une fois remis du choc de la première rencontre, ne tardent pas à se rendre compte que Sunako ne supporte pas la vue des gens beaux, qu’elle juge « trop éblouissants » : en effet regarder trop longtemps une « créature de lumière » lui cause des symptômes assez violents qui vont du saignement de nez à l’évanouissement. Epouvantés par l’ampleur de la tâche, les quatre garçons ne se découragent pas pour autant (il en va de leur loyer !!!) : ils transformeront Sunako en « lady », coûte que coûte…

Mon avis :

Yamato Nadeshiko est une comédie teintée de culture gothique et horrifique, avec des éléments parodiques qui reprennent les clichés sentimentaux et les codes du shojo. Les rapports entre les personnages se développent au fil des chapitres, qui forment autant de courtes histoires indépendantes. Avec pour fil rouge la métamorphose de Sunako en « lady », le scénario suit un schéma qui fonctionne sur le principe « deux pas en avant, trois pas en arrière » (il y a d’ailleurs un mini jeu de l’oie basé sur le manga qui l’illustre assez bien) : chaque fois que Sunako semble montrer des signes de « progrès », il s’avère que la réalité n’est pas du tout ce qu’on s’imaginait. Malgré tout, ses rapports avec les autres évoluent, et, petit à petit, elle s’ouvre davantage, se socialise, et semble être de moins en moins allergique à la beauté de ses compagnons.
Les quatre garçons avec lesquels elle est contrainte de cohabiter ont des caractères très distincts qui sont approfondis à mesure qu’on avance dans le manga :
- Ranmaru est un playboy issu d’une famille très aisée, qui courtise volontiers les femmes mariées. Des quatre, c’est celui qui assume le plus son statut de « bishounen », et sait parfaitement jouer de son pouvoir de séduction.
- Takenaga est issu d’une famille respectable et est destiné à prendre la place de son père à la tête du clan. C’est le plus intellectuel des quatre, et il a une petite amie, Naie, qui se trouve être l’équivalent féminin des quatre garçons : lycéenne très belle et très populaire. Naie a un caractère extraverti et spontané (parfois un peu trop, ce qui la rend gaffeuse).
- Yuki est, contrairement aux deux autres, issu d’une famille plutôt humble socialement. Il a des traits délicats (presque féminins) et un caractère tendre qui en font le plus « mignon » des quatre. Il a lui aussi une petite amie, Machiko.
- Kyohei est le dernier des quatre garçons à avoir emménagé dans la résidence Nakahara. « Trouvé » dans la rue un soir de pluie « comme un chiot abandonné » par la propriétaire, il est parti de chez lui à la suite de problèmes familiaux (qui ont leur importance mais que je ne développerai pas ici). Sans cesse victime de harcèlement à cause de son apparence, il est incapable de garder un emploi et manque toujours d’argent (et est donc particulièrement sensible aux avantages d’un loyer gratuit). Il a un caractère intempestif et ne pense qu’à manger.
Takenaga, Sunako et Ranmaru passent Noël devant Edward Scissorhands...
J’ai un énorme coup de cœur pour le personnage de Sunako : touchante, hilarante, elle vit vraiment dans son propre univers et, à sa manière très personnelle, est un modèle d’individualisme : forte, indépendante, n’aspirant qu’à vivre tranquille, elle ne compte sur personne d’autre qu’elle-même et, quand elle a un objectif à atteindre, rien ni personne ne peut se mettre en travers de son chemin (ou presque^^). Ce qui ne l’empêche pas de montrer, quand les circonstances l’exigent, une générosité et une affection sincères à l’égard de ceux qui l’entourent. En outre, elle possède de nombreux talents (elle est en particulier une cuisinière virtuose) et qualités qui n’ont souvent rien à voir avec ceux que doit posséder une « lady ». Pour la dessiner, l’auteure a recours à une palette très étendue qui va de la forme « chibi » (franchement irrésistible) à des dessins plus classiques (Sunako est en fait une jeune femme très jolie, quand son visage n’est pas déformé par une expression effrayante…), en passant par des modes horrifiques : fantôme, démon, monstre, vampire, sorcière… où qu’elle aille, Sunako fait généralement une forte impression sur ceux qu’elle rencontre, bonne ou mauvaise. D’un tempérament passionné et obsessionnel (pour ne pas dire maniaque), elle a une personnalité originale que le lecteur ne veut pas voir disparaître sous un masque de « lady », mais ses blessures psychologiques doivent guérir d’une manière ou d’une autre. Au fil du manga, elle s’habitue aux garçons qui partagent son toit, sort davantage de son antre, se sociabilise petit à petit, mais reste toujours récalcitrante aux assauts de sa tante pour faire d’elle une demoiselle accomplie et « normale » : sous les gags et la parodie légère, l’auteure du manga pose un regard assez dur sur la superficialité, le conformisme et le culte de l’apparence, symbolisés par la tante de Sunako (figure despotique et capricieuse que j’ai du mal à trouver sympathique, même si au fond sa motivation principale est son affection pour sa nièce) et les hordes de groupies hystériques qui harcèlent les quatre adolescents, montrées sous un jour beaucoup plus dangereux et terrifiant (cf la saint-Valentin, entre autres) que Sunako, qui a pourtant des épisodes psychotiques assez intenses de son côté.
Kyohei, second personnage principal du manga, est le plus beau et le plus admiré des quatre garçons (bien malgré lui). Amateur de combats, obsédé par l’argent et la nourriture, son caractère bien trempé et ses goûts s’accordent étonnamment bien avec ceux de Sunako : une complicité très forte se développe entre eux au fil des chapitres, au point de donner l’apparence d’un véritable « couple ». Les autres personnages (en particulier Naie, la petite amie de Takenaga) tentent régulièrement d’éveiller Sunako et Kyohei à leurs sentiments l’un pour l’autre, mais leurs stratagèmes échouent toujours lamentablement. Kyohei reste celui qui comprend le mieux Sunako, et il semble en effet qu’ils soient, à terme, destinés à former un couple authentique.

Pour conclure :

YamaNade est un manga très drôle et agréable à lire, pas prise de tête du tout. Son seul défaut, s’il faut en trouver un, est le dessin en « mode normal » de certains personnages qui n’est pas très différencié et peut créer des confusions (par exemple il m’est arrivé plusieurs fois de me demander si tel personnage était Kyohei ou Ranmaru) ; par contre, l’auteure excelle dans le dessin des caricatures : hilarantes, très inventives et expressives, la mangaka sait très bien en tirer parti dans sa mise en scène.
L’adaptation en anime reste bien dans l’esprit du manga d’origine (et, il me semble, en restitue fidèlement l’atmosphère loufoque et l’humour au 3000e degré) et est sympathique à regarder. En 2010 le manga a aussi été adapté en vrais personnages dans un drama de 10 épisodes, que j’ai visionné dans ma lancée. C’est la première fois que je regarde un drama asiatique, donc mon avis est peut-être à côté de la plaque, mais je le donne quand-même :p : j’ai apprécié les efforts d’adaptation, et l’enthousiasme des comédiens, mais j’ai été un peu déçue par la personnalité de Sunako (trop « autiste » à mon goût), l’accent mis sur le pathos et les bons sentiments (très 1er degré pour le coup), et le gommage des aspects « gore » . Ceci dit, il y a des choses que j’ai quand même aimées (les scènes entre Kyohei et sa mère, en particulier, et le personnage du barman qui porte à chaque épisode un tee-shirt assorti au groupe de rock dont il diffuse les chansons dans son bar^^). Bref, même si c’était amusant à regarder, je préfère, de loin, suivre le manga.